Le rôle clé de la génétique pour améliorer la prise en charge des patients diabétiques de type 2

L’obésité et le mode de vie sédentaire sont des facteurs majeurs contribuant au développement du diabète de type 2 (DT2). Cependant, des recherches menées au cours des 25 dernières années ont également mis en évidence une forte composante génétique. Cette maladie, qui représente 90 à 95 % des cas de diabète, présente une héritabilité significative, estimée entre 31 et 72 % selon des études familiales et sur les jumeaux.

La revue du Pr Philippe Froguel et du Dr Amélie Bonnefond publiée dans le prestigieux journal The Lancet Diabetes & Endocrinology analyse le diabète de type 2 sous l’angle génétique, en apportant un éclairage novateur sur sa physiopathologie et ses implications pour la médecine de précision. Contrairement à l’approche traditionnelle qui distingue les formes monogéniques et polygéniques, des preuves récentes suggèrent un continuum génétique intégrant des contributions monogéniques, oligogéniques et polygéniques. Ces mécanismes jouent des rôles complémentaires dans la physiopathologie du DT2.

Les avancées en génétique offrent une compréhension approfondie des mécanismes sous-jacents à la maladie et ouvrent des perspectives prometteuses pour des approches de médecine de précision susceptibles de transformer la prise en charge du DT2. En outre, les facteurs environnementaux, notamment les modifications épigénétiques, ajoutent une dimension supplémentaire de complexité à la compréhension et au traitement de cette pathologie multifactorielle.

Pr Philippe Froguel - Génétique et diabète

Philippe Froguel, médecin et enseignant-chercheur en endocrinologie, biologie moléculaire et génétique, se situe à la pointe de la recherche en médecine génomique à la tête d’un laboratoire franco-britannique basé à Lille et à Londres. Il est également le Responsable Scientifique et Technique du Centre National de médecine de Précision des Diabètes PreciDIAB.

Quel peut être l’impact de cette revue dans la prise en charge des patients ?

Philippe Froguel : Cette revue est destinée aux étudiants, chercheurs et spécialistes de diabétologie pour leur faire comprendre comme la génétique permettait de progresser dans la compréhension des causes du diabète de type 2 (90% des diabètes) et notamment de l’importance de la génétique dans ces causes qui ouvre la voie à une médecine plus personnalisée.

Quelles sont les prochaines étapes, les prochains projets que vous pensez développer au sein de l’EGID ?

PF : A Lille nous bénéficions des équipes du laboratoire d’excellence EGID (European Genomic Institute for Diabetes) mobilisée sur les aspects de recherche fondamentale expérimentale dite d’amont car l’innovation ne peut venir que de ce genre de recherche et des équipes du Centre National PRECIDIAB qui se focalisent sur la recherche clinique, sur la prévention des diabètes et aussi de l’obésité et sur de nouvelles voies thérapeutiques.

 

Depuis quelques années, nous avons de nouvelles classes de médicaments très efficaces pour faire maigrir, éviter l’insuffisance cardiaque et rénale etc., mais encore faut-il les donner au bon moment et chez les bonnes personnes, et c’est cela tout l’enjeu de la médecine de précision…

Philippe Froguel

La médecine de précision va-t-elle, dans les années à venir, offrir l’espoir d’un traitement adapté pour chaque patient atteint de DT2 ?

PF : La médecine de précision est tout simplement une médecine personnalisée des patients atteints de diabète qui ne se focalise pas simplement sur la normalisation de la glycémie (indispensable mais pas suffisante) mais aussi sur la prévention des complications cardio-vasculaires, hépatiques, musculaires, rénales, accidents vasculaires cérébraux et certains cancers (pancréas, foie, colon, sein…) en fonction des facteurs de risque des patients notamment génétiques. Depuis quelques années, nous avons de nouvelles classes de médicaments très efficaces pour faire maigrir, éviter l’insuffisance cardiaque et rénale etc., mais encore faut-il les donner au bon moment et chez les bonnes personnes, et c’est cela tout l’enjeu de la médecine de précision : précision dans l’estimation des risques de complications, précision dans les diagnostics précoces de ces complications, précision dans l’établissement de l’équilibre glycémique, précision dans la nutrition adaptée à chaque patient et dans les recommandations d’activité physique souhaitable et bien sûr précision dans les schémas thérapeutiques à prescrire pour être efficace sans effets secondaires.