L’épidémie de chikungunya qui touche actuellement La Réunion suscite des préoccupations parmi les voyageurs prévoyant un séjour sur l’île. Ce virus, transmis par les moustiques, peut entraîner des symptômes graves, surtout pour les personnes les plus âgées. Qu’est-ce que le chikungunya exactement et comment peut-on se protéger efficacement ? Existe-t-il un vaccin ? Quels sont les symptômes à surveiller et quelles sont les recommandations de santé à suivre avant de partir ? On fait le point avec la Dr Perrine Decaudin, médecin responsable du Centre de Vaccinations Internationales à l’Institut Pasteur de Lille.
Qu’est-ce que le chikungunya ?
Le chikungunya est une maladie virale transmise par 2 types de moustiques, dont le moustique tigre. Elle se manifeste généralement par une forte fièvre et des douleurs articulaires intenses. Si les symptômes sont souvent temporaires, environ 40 % des personnes symptomatiques développent une forme chronique, caractérisée par des douleurs articulaires persistantes.
Chez les personnes fragiles, le chikungunya peut également entraîner des formes plus graves, voire mortelles.
Quels sont les symptômes du chikungunya ?
Les symptômes du chikungunya apparaissent en moyenne entre 4 et 7 jours après la piqûre. Les signes courants incluent :
- Fièvre élevée, souvent accompagnée de frissons.
- Douleurs articulaires sévères, parfois incapacitantes.
- Éruption cutanée, fatigue et maux de tête.

Comment s’en protéger ?
Un vaccin contre le chikungunya, IXCHIQ, a été développé et a récemment obtenu une autorisation de mise sur le marché pour les adolescents à partir de 12 ans (en raison de l’absence de données suffisantes sur son efficacité et sa sécurité chez les enfants). Il reste cependant disponible de manière limitée.
Actuellement, il est recommandé en priorité pour les personnes de 18 ans et plus présentant des comorbidités (hypertension artérielle, diabète, maladies cardiovasculaires, respiratoires, rénales, hépatiques ou neurovasculaires). En revanche, sa distribution a été temporairement suspendue pour les personnes de plus de 65 ans, après l’apparition de trois effets indésirables graves — dont un décès — chez des personnes de plus de 80 ans. Il est important de préciser que le lien entre ces événements et le vaccin n’est pas établi à ce jour ; la suspension s’inscrit dans une démarche de précaution.
À noter également : le vaccin n’est pas recommandé pendant la grossesse. Il n’est pas contre-indiqué, mais nécessite une décision médicale individualisée.
Enfin, le vaccin, une fois administré, nécessite environ 2 à 4 semaines pour atteindre son efficacité maximale, ce qui souligne l’importance de la planification avant votre départ.
La HAS précise que le vaccin IXCHIQ est contre-indiqué chez :
- Les personnes immunodéprimées, en raison de la nature du vaccin vivant atténué (le vaccin contient une version affaiblie du virus).
En attendant une plus large disponibilité, la Haute Autorité de Santé recommande vivement la mise en place de mesures préventives efficaces pour éviter les piqûres de moustiques :
- Utiliser des répulsifs recommandés : appliquez-les sur la peau et les vêtements. Certains produits à base de DEET, d’Icaridine ou d’IR3535 sont particulièrement efficaces — veillez à bien respecter les concentrations conseillées selon l’âge et la situation.
- Porter des vêtements longs et amples : cela vous protègera particulièrement lors des périodes où les moustiques sont les plus actifs, le matin et dès le début de soirée.
- Éviter les eaux stagnantes : en voyage, assurez-vous qu’il n’y ait pas de points d’eau stagnante autour de vous, car ce sont des lieux propices à la reproduction des moustiques.
On fait le point sur l’épidémie actuelle qui touche La Réunion
39 000 cas confirmés de chikungunya ont été recensés à La Réunion, accompagnés de près de 113 000 consultations médicales liées à la maladie. Il s’agit de la première épidémie d’ampleur depuis celle de 2005, au cours de laquelle près de 40 % de la population avait été touchée. En raison de cette recrudescence, les autorités sanitaires locales ont renforcé leurs mesures de prévention. Les voyageurs doivent donc être particulièrement vigilants, et se préparer avant leur départ pour limiter le risque d’infection.
Faut-il s’inquiéter ?
Bien que la situation reste préoccupante, en suivant les recommandations vaccinales et de prévention, telles que l’utilisation de répulsifs et le port de vêtements adaptés, vous pouvez limiter les risques. Si vous êtes une personne fragile ou avez des antécédents médicaux, il est particulièrement important de prendre des précautions supplémentaires.
Les autorités sanitaires travaillent activement pour limiter la propagation du virus. Mais le succès de la prévention dépend aussi de votre préparation avant le voyage.
Que faire si vous avez contracté le chikungunya lors de votre séjour à La Réunion ?
Si vous êtes déjà en voyage à La Réunion et pensez avoir contracté le chikungunya, ou si vous avez des symptômes comme une fièvre élevée accompagnée de douleurs articulaires, il est essentiel de consulter rapidement un professionnel de santé. Le chikungunya est généralement diagnostiqué par un médecin sur la base de vos symptômes et, dans certains cas, un test sanguin peut être effectué pour confirmer la présence du virus.
Si vous avez un doute sur votre état de santé, ne tardez pas à consulter un médecin. Vous pouvez également prendre rendez-vous avec un spécialiste en santé-voyage pour discuter de vos symptômes et obtenir des conseils personnalisés. Si vous êtes déjà revenu de La Réunion et ressentez des symptômes similaires, il est important de consulter dès que possible pour un suivi adapté.
Notre centre de vaccinations internationales à l’Institut Pasteur de Lille peut vous aider à vous accompagner pour préparer votre voyage ou vous fournir des conseils sur les démarches à suivre pour vous soigner et prévenir la propagation du virus à votre retour. Vous pouvez prendre rendez-vous directement sur Doctolib ou via notre plateforme METIS pour obtenir un suivi médical adapté.
Existe-t-il un risque en France métropolitaine ?
Le risque d’infection en métropole reste faible, mais il évolue. Le moustique tigre est aujourd’hui présent dans toutes les régions de France, bien que certains départements, comme ceux des Hauts-de-France, soient encore relativement épargnés (situation à surveiller en 2025).
La majorité des cas recensés en métropole concernent des voyageurs revenant de zones à risque. Toutefois, des cas autochtones ont déjà été observés, comme en 2024, ce qui montre que la circulation locale du virus est possible. Ce phénomène, similaire à celui observé avec la dengue, tend à s’accentuer d’année en année.
Le risque d’infection locale reste donc très limité, mais il est toujours recommandé de prendre des mesures de prévention pour éviter les piqûres de moustiques.
Bien que l’épidémie actuelle de chikungunya à La Réunion nécessite une vigilance accrue, les mesures de prévention recommandées par les autorités sanitaires, telles que la vaccination, l’utilisation de répulsifs et le port de vêtements adaptés, permettent de réduire efficacement les risques d’infection. Il est essentiel que les voyageurs se préparent adéquatement avant leur départ pour garantir leur sécurité et leur santé. En cas de doute, n’hésitez pas à contacter l’Institut Pasteur de Lille et son Centre de Vaccinations Internationales (CVI) pour des conseils personnalisés et un suivi médical adapté.
Dr Perrine Decaudin
Médecin Responsable du Centre de Vaccinations Internationales
Sources : Haute Autorité de Santé