Le « bon usage des médicaments » concerne les principes de prescription, de dispensation, d’administration et de surveillance d’un traitement médicamenteux dans le but d’optimiser son efficacité et de limiter le risque d’accident ou d’en diagnostiquer le plus rapidement possible la survenue.1

Le non-respect de ces principes entraine un mésusage médicamenteux, correspondant à une utilisation intentionnelle et inappropriée d’un médicament ou d’un produit, non conforme à l’autorisation de mise sur le marché ou à l’enregistrement, ainsi qu’aux recommandations de bonnes pratiques.

En France, l’affaire du MEDIATOR est un exemple récent de mésusage qui pourrait avoir été responsable de 3100 hospitalisations et 1300 décès pour insuffisance valvulaire 2. Initialement indiqué pour les diabétiques en surpoids, celui-ci a largement été prescrit hors AMM – c’est-à-dire une prescription pour d’autres indications que celles pour lesquelles le médicament a reçu son autorisation de mise sur le marché –  pour les personnes désireuses de perdre du poids.

Un autre exemple de mésusage probable est la prescription inappropriée d’antibiotiques. En effet, la France est également connue pour être un des pays européens les plus consommateurs. L’exposition des Français est 30% plus élevée que la moyenne européenne et celle des habitants des Hauts-de-France 10% plus élevée que la moyenne des Français. 3

Les effets indésirables fréquents : un risque souvent évitable 

L’iatrogénie médicamenteuse, qui englobe le mésusage médicamenteux, désigne l’ensemble des effets indésirables provoqués par la prise d’un ou plusieurs médicaments. Elle est responsable de 130 000 hospitalisations par an4, notamment chez les plus de 65 ans. 45 à 70 % de ces incidents seraient évitables  5.6. car ils résultent, par exemple :

  • d’une erreur dans la prise du médicament. Celui-ci est pris au mauvais horaire, en double dose, etc.
  • d’une interaction entre différents médicaments d’un même traitement.

Le Bon Usage du médicament est un sujet récurrent depuis des années. Il s’impose définitivement dans le cadre de la stratégie « Ma Santé 2022 » qui fait de la qualité et de la pertinence des soins, un des cinq chantiers prioritaires.

A travers ses expériences sanitaires au cours de l’histoire, la France s’est dotée de méthodes et d’outils scientifiques qui ont révolutionné la façon de traiter et gérer les risques médicamenteux. Une prévention active est également mise en place afin de diminuer les risques liés aux médicaments pour les personnes de plus de 65 ans.

Différents dispositifs2.7.8ont été mis en place pour promouvoir le bon usage du médicament en France. L’objectif est certes de mieux prescrire, mais aussi améliorer la communication interprofessionnelle et l’information du patient. Différents niveaux d’interventions sont possibles afin de limiter le mésusage.

Au niveau pharmacologique, le médicament nécessite une autorisation de mise sur le Marché ré-évaluable (AMM) après des travaux d’évaluations scientifiques. Une banque de données publiques sur les médicaments permet de fournir à tous un résumé des caractéristiques pharmacologiques du produit, l’existence de générique, et d’informer sur la surveillance du produit. Les médicaments sont également évalués sur leur service médical rendu conditionnant leur taux de remboursement.

Certaines utilisations hors AMM sont validées car concernent certaines populations spécifiques (pédiatrique par exemple) ou dans le cadre d’une utilisation temporaire d’utilisation (ATU) répondant à des critères précis. Ces modes de prescriptions doivent être surveillés afin de prévenir le mésusage.

Les recommandations de bon usage sont complétés par les référentiels émanant de sociétés savantes (conférence de consensus) mais aussi par la presse médicale (revue indépendante Prescrire par exemple).

  • Au niveau des professionnels de santé, la nécessité d’une formation continue est nécessaire pour améliorer la qualité et la sécurité des soins. Les logiciels médicaux s’inscrivant dans le Ségur numérique de la santé permet d’apporter des sécurités supplémentaires : fluidité de communication, sécurité de prescription. Le dossier pharmacologique est créé et permet de visualiser l’historique des dispensions du patient de toutes les officines au cours des 4  derniers mois. En effet, en 20189, 80% des adultes déclarent avoir utilisé des médicaments sans avoir recours à une consultation chez le médecin. Enfin, Les professionnels de santé sont un relai primordial  pour la notification des effets indésirables constatés par les patients et ainsi enrichir la base de données pharmacologiques.

  • Au niveau du patient, l’information est essentielle. Elle concerne aussi bien sur la nature du traitement, mode d’administration et sa durée limitée. Au-delà de l’information, il est nécessaire que le patient soit impliqué dans sa démarche de soin et devienne acteur de sa santé.

Quelques règles de bon usage des médicaments

Le médicament contient une substance active qui a des effets thérapeutiques sur votre organisme. Peuvent aussi survenir des effets indésirables avec tout traitement. Il est là pour soigner mais s’il est mal utilisé, il peut être dangereux.

  • Suivez la prescription de votre médecin et les conseils de votre pharmacien.
  • Chaque traitement correspond à un cas particulier.
  • Indiquez à votre médecin et à votre pharmacien les médicaments que vous utilisez.
  • Respectez la prescription.
  • Restez attentifs aux effets secondaires éventuels.
  • Apprenez à repérer la « dénomination commune internationale » (DCI)
  • Ne prenez pas les médicaments périmés ou non utilisés d’un précédent traitement ou donnés par un proche
  • Tenez les médicaments hors de la portée des enfants.

Retrouvez ces règles en détail sur le site du Ministère de la santé et de la prévention : https://solidarites-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/medicaments/le-bon-usage-des-medicaments/article/quelques-regles-de-bon-usage-des-medicaments

Avec les évolutions initiées via le projet de loi Ma santé 2022 sur la qualité des soins, la question du mésusage et son contrôle est devenue un réel enjeu de santé publique prioritaire.

Dr LAHOUSSE Sophie
Médecin, Centre Prévention Santé Longévité

Sources :

1 Principe du bon usage du médicament et des thérapeutiques non médicamenteuses. La revue du praticien. 2018

2 L’évaluation du bon usage du médicament en France : Définitions, enjeux et méthodes en pharmaco-épidémiologie. Thèse du Dr SABIN.2015

3Antibiorésistance : un risque accru dans les HDF. ARS 2017

4 Rapport Charges et produits pour l’année 2018 de l’Assurance maladie

5 Etude Open Health, menée avec France Assos santé du 01/09/2016 au 30/11/2016, auprès de 154.304 personnes, âgées de 65ans et plus.

6 Le Cossec C. et coll., Irdes, octobre 2015

7 Rapport sur la surveillance et le bon usage des médicaments en France. B Bégaud et D Costagliola, pour le ministère des Affaires sociales et de la santé. Septembre 2013. La documentation française.

8  Assises du médicament. Edouard Couty  et Thomas Lesueur. Juin 2011

9 Recours à l’automédication par sexe en France 2018 –  Statista Research Department,  sept. 2019